jeudi 30 janvier 2014

Escale à Kuala Lumpur : Thaipusam






Le 15 janvier, l'échéance de mon visa indonésien m'a conduite à Kuala Lumpur. La vie étant bien faite, le lendemain soir de mon arrivée, commençait Thaipusam, une fête religieuse hindoue célébrée le dixième mois lunaire du calendrier Tamoul. Elle n'est autorisée qu'en Malaisie et à Singapour. Pendant 24 heures, sans discontinuer, des milliers de personnes ont afflué en masse vers les grottes de Batu, consacrées à Muruga, dieu de la guerre et de la fertilité, en une procession incessante de fidèles. 

La plupart d'entre eux priaient et portaient sur leur tête des offrandes, principalement du lait et des couronnes de fleurs. Certains portaient aussi, sur les dix kilomètres qui séparent le sanctuaire de Kuala Lumpur, des sortes de temples miniatures dédiés à une déité, entourés de proches à l'affût d'un signe de faiblesse, prêts à tendre un tabouret au pénitent pour qu'il puisse s'asseoir et reprendre des forces, avant de se relancer dans la procession et de gravir les 272 marches menant aux temples. 


D'autres, particulièrement zélés, s'étaient percés la langue, le visage ou le corps de barres de fer plus ou moins lourdes ou de crochets auxquels pendaient des clochettes ou des citrons, en signe de purification, voire des cordes. Pas de sang, pourtant. Les mutilations corporelles, certes impressionnantes, seraient réalisées à l'issue d'une longue préparation mêlant jeûne et prière. Ils avançaient concentrés, épuisés ou bien en transe. Aux fidèles, se mêlaient une foule d'observateurs curieux et à la ferveur de cette fête religieuse, s'ajoutait une ambiance de festival, avec scène musicale, stands de friture, voire de rasage de crâne avant la montée finale...






Lorsque je suis partie, au petit matin, la lune rouge s'apprêtait à disparaître et la foule continuait d'affluer. Le flot n'a commencé à se tarir que le soir suivant. 











mercredi 22 janvier 2014

Nusa Penida

Je disais donc, j'ai choisi de finir mon séjour au rythme tranquille de l'île de Nusa Penida. Réactions choisies : "Where?", "but why?", "Two weeks!..." Et oui. Je suis tombée sous le charme de cette île. Peut-être se rapproche-t-elle de ce que Bali était il y a une trentaine d'années, avant de succomber à l'emprise du Dieu Tourisme. Ici, personne ne tente de me vendre quoi que ce soit et si mon scooter risque de finir dans le fossé, c'est plutôt à cause d'un nid de poule que d'un conducteur fou. Les enfants me saluent de "Hello !" enthousiastes suivis, au choix, de "you're beautiful" ou "I love you" (bon, parfois, l'inverse aussi, ça reste des enfants). Le contact avec les habitants est facile et paisible, surtout avec quelques mots d'indonésiens dans ses bagages. Beaucoup m'ont regardé passer intrigués, lors de mes ballades, tout en me rendant mes "selamat pagi" (bonjour) avec le sourire. 

Sous le royaume de Klungkung, l'île de Nusa Penida a longtemps accueilli les indésirables. De son passé de bagne, elle a gardé une réputation austère, quelques légendes, des histoires de magie noire. Sur ce point, j'ai reçu deux versions: la première me faisait comprendre que ce n'était que légendes; la seconde, que la magie noire est indissociable de la magie blanche, c'est simplement une manière d'évoquer le lien aux esprits, certains étant bons, d'autres mauvais. 




La plupart des habitants vivent de la culture des algues introduite sur l'île dans les années 80. Au petit matin, à l'occasion d'une marée basse, on peut les voir les récolter à la main, une bouée et un panier de feuilles de palmier à leurs côtés, face au Mont Agun, la montagne sacrée de Bali. Une fois séchées, les algues sont revendues pour être utilisées dans les cosmétiques et gélifiants.



Le soir, sur la plage de la baie de cristal, les enfants jouent dans les vagues, avant de se laver dans l'eau de la source voisine. En s'enfonçant dans les terres, on croise des vieux et des vieilles, certains pliés en deux, qui portent sur leur tête le fourrage pour leurs bêtes, du bois ou des paniers d'offrandes. Il y a une trentaine d'années, il n'y avait ni électricité ni véhicule motorisé sur cette île dont les traditions sont encore fortes.




Côté spiritualité, comme à Bali, chaque village ou communauté possède au moins trois temples principaux, sans compter les temples familiaux. Le Goa Giri Putri, dans des grottes, et le temple de Ped, font partie des plus importants et attirent les fidèles de Bali. Côté nature, il suffit de chausser les palmes et de nager au-dessus des champs d'algues pour rejoindre coraux et poissons tropicaux. C'est autour de cette île qu'on peut aller à la rencontre des raies mantas et des poissons lunes, les plus grands poissons au monde (jusqu'en octobre). Les amateurs d'oiseaux peuvent quant à eux y observer le bali starling. En saison des pluies, la végétation est luxuriante, même si l'île a souffert de déforestation. On ne le réalise qu'en quittant la côte pour les collines et le versant plus sauvage de Nusa Penida.







Sous l'action du FNPF (Friends of the National Park Foundation) et avec l'implication des villageois, l'île est devenue un sanctuaire pour oiseaux, l'action la plus marquante étant le développement de la population des Bali starling. La Fondation s'emploie également à remédier à la déforestation, en mettant à disposition des habitants des arbres à planter qu'elle fait livrer ou cultive. Elle développe un programme de bourses scolaires et universitaires pour soutenir les enfants de Nusa Penida dans leurs études, ainsi que des cours de danse balinaise et une sensibilisation à l'environnement. Elle entretient aussi un jardin bio à titre d'exemple, pour encourager les habitants à cultiver leurs propres légumes et diversifier leurs cultures (algues sur la côte, maïs dans les terres prédominent), sachant que la majorité est importée de Bali alors qu'ils poussent très bien sur l'île. Bref, le FNPF s'investit dans la protection de la vie sauvage et l'amélioration du bien-être des habitants de Nusa Penida. Les touristes sont rares et certains les souhaiteraient plus nombreux, tout en considérant Bali comme le contre-exemple absolu. Pour l’instant, les règles des communautés semblent suffisamment fortes pour que l'île reste ce qu'elle est. J'espère vraiment que Nusa Penida trouvera ainsi sa propre voie...

C'est ici que j'ai passé les deux premières semaines de l'année 2014, en tant que "volontaire" aux côtés de l'équipe locale et d'autres voyageurs âgés de 13 à 77 ans. J'ai retrouvé le goût du voyage en me laissant aller au rythme paisible de l'île. Se rendre sur la plage au lever du jour (les coqs ne vous laissent pas trop le choix d'une grasse mat'...), se voir inviter par un voisin à s'asseoir et à apprécier le "spectacle" matinal de la culture des algues, entretenir le jardin bio le matin, planter des arbres, dégager le nouveau site en construction, se rafraîchir dans l'océan, aller saluer les poissons, partir en ballade à scooter dans les montagnes pour rejoindre une plage ou des falaises, se perdre dans les chemins de traverse, faire un bout de route avec une femme revenant des champs, un lourd panier sur sa tête, échanger un sourire avec une grand-mère sans âge après quelques mots d'indonésien, répondre aux saluts des enfants, se contenter d'être là, de vivre l'île. Découvrir l'enthousiasme des enfants du club d'anglais (je les adopterais bien tous s'ils n'avaient pas déjà une famille), dîner face à la mer, lorsque les lumières du soleil couchant se reflètent sur le mont Agun, ou dans un warung tout en discutant avec un professeur de langues local (japonais, anglais, indonésien, balinais), finir la soirée avec un verre d'arak au son d'une guitare... Se rendre au temple un soir de pleine lune avec un voisin et apprendre à y prier... 

Une précédente volontaire, Carolina Granado Pinto, a laissé derrière elle un petit livre sur Nusa Penida et le "slow travel" et c'est bien de cela qu'il s'agit : ralentir, s'adapter au rythme de l'île, prendre du temps pour soi et le partager avec les autres, ne pas hésiter à se perdre, s'investir dans les activités locales, partager ses idées et ses compétences, emprunter les chemins de traverse, sortir de sa zone de confort et plutôt que de se contenter de rester dans un lieu, le vivre intensément... Le "slow travel" ou un état d'esprit, du respect, l'envie de créer une relation qui ait du sens avec une île, ses habitants, leur culture. Pensez-y si l'envie vous prend d'y faire un tour ! J'ai bien pensé garder le secret, mais c'est grâce à un blog de voyageurs que j'ai décidé de m'y rendre, alors partageons... Nusa Penida ne se consomme pas, elle se vit. 

vendredi 17 janvier 2014

Photos...

ça y est, l'album du Japon est complet (deux mois après, il était temps) et celui de Bali est en ligne. Nusa Penida devrait suivre dans peu de temps. Enjoy!

jeudi 16 janvier 2014

Bali, une île qui fait rêver ?






Bali vous fait rêver? Rien de mieux que d'y faire un tour pour ne plus fantasmer sur cette île, tant l'écart entre le rêve et la réalité est grand. 

J'exagère? Tentons d'être objective... 

L'île peut être séduisante : l'omniprésence de l’hindouisme visible dans les offrandes, cérémonies quotidiennes et temples multiples, l'architecture balinaise, les spas, la nature luxuriante, la beauté et l'intelligence des rizières (un travail éreintant), les danses et tenues traditionnelles, les sourires de certains, l'abondance de fruits, les plages de sable noir, les fonds marins, les embarcations des pêcheurs, une culture unique au monde... Après tout, c'est l"île des dieux", non? 
Mais, car il y a un "mais", Bali, c'est aussi un ultra-développement touristique, des embouteillages, de la circulation, des rencontres biaisées par les rapports marchands et la différence de revenus, une vision bien pauvre de l'Australie à travers ses représentants venus surfer et se saouler à bas prix (ce n'est pas comme s'ils avaient des plages et des bars dans leur pays), la nécessité de négocier tous les prix annoncés, systématiquement excessifs, des ordures jonchant les plages et les espaces naturels, et un problème  paradoxal d'approvisionnement en eau, si j'en crois certains articles, en raison de l'utilisation qu'en font les hôtels. 

Il suffit de se renseigner un peu pour le savoir avant de venir, mais j'avais espoir qu'il serait possible de sortir des sentiers battus et de faire de belles rencontres. Echec et mat! Voyageurs et routards, si vous cherchez de l'authenticité, ne restez pas trop longtemps ici, à moins d'avoir des contacts ou un guide qui vous aideront à gratter la surface pour rentrer dans le vif du sujet : fuyez plus loin vers l'Est. Lombok, Florès, Sulawesi... L'Indonésie est vaste et vous attend. 

Mes meilleurs moments sont donc moins liés au voyage en lui-même qu'à de nouvelles expériences, l'un des bons côtés de Bali: la découverte de la plongée et des fonds marins, mon cours de danse balinaise à Ubud à l'issue duquel l'enseignante m'a proposé de participer à la cérémonie de son village, le stage de méditation vipassana animé par un moine bouddhiste du Myanmar et mon court séjour sur l'île de Nusa Lembongan, où une norvégienne m'a conseillé un hébergement à Lombok tout en me recommandant d'éviter la chambre du premier étage, hantée. Puis en me rassurant : si on buvait suffisamment de Bintang – la bière locale – les esprits ne pourraient pas établir de communication avec nous ; par précaution, et même si nous étions sur une autre île, nous en avons donc repris une dernière. Efficace. 

J'étais curieuse de découvrir Ubud, mais si les environs sont superbes (jungle et rizières), le centre où j'ai échoué lors de mon arrivée de nuit est ultra-commercial (« taxi, taxi, taxi taxi »!!!!). Je me suis même demandé un temps où étaient les fameuses rizières... Un conseil: choisissez un hébergement hors centre. Le livre puis le filme "Eat, pray, love" ont entraîné un développement de l'industrie du bien-être qui attire nombre d'européens (surtout d'européennes) et rend le tout assez factice. Difficile d'y trouver de l'authenticité. Ou même du sens. 


Néanmoins, dans les environs, il y a de belles ballades, notamment au Tirta Empul, le temple de l'eau, dans lequel les balinais viennent se purifier et récolter l'eau de la source sacrée pour leurs rituels. A l'Ouest d'Ubud, à une ou deux heures de route, les rizières de Jatiluwih sont très belles et il est possible de poursuivre jusqu'au temple Batukaru, perdu dans la montagne et la jungle.

On peut aussi goûter le babi guling, se détendre dans un spa, observer les singes de la forêt, assister à un spectacle de Legong ou de Kecak, se promener dans les rizières, explorer les villages d'artisans et d'artistes alentour, partir en excursion faire l’ascension du Mont Batur, l'un des volcans de l'île, pour assister au lever du soleil (entre deux nuages). Certains proposent l'ascension du Mont Agun, la montagne la plus sacrée de l'île, en quatre heures mais il semble qu'elle prenne plutôt douze heures, comme en témoignaient deux américains rentrés épuisés. 

Sur la côte Nord, Lovina est une station balnéaire endormie assez agréable (à condition de supporter le harcèlement des vendeurs malheureusement désœuvrés) : on peut observer la vie des pêcheurs, s'immerger dans les sources d'eau chaude de Banjar, méditer au temple bouddhiste de l'île, le Bramavihara Arama, ou plonger à Menjangan à une heure de là. Je voulais randonner à Munduk, dans les montagnes, mais des pluies diluviennes m'en ont dissuadée. Je n'aurai pas tout vu à Bali : il manque la plage d'Uluwatu, la péninsule de Kii, le coucher de soleil à Tanah Lot, mais plutôt que d'ajouter des sites à ma liste déjà bien remplie et considérant que j'avais assez donné, j'ai décidé de finir mon séjour au rythme tranquille de l'île de Nusa Penida, dont je vous parlerai prochainement. A suivre...

NB: pour ceux que ça intéresse, un article des études caribéennes (http://etudescaribeennes.revues.org/5385) expose la problématique de Bali avec justesse. Il laisse planer un doute entre "last paradise" ou "lost paradise". Mais il date de 2011. Pour ma part, en 2013, le doute est levé: "lost paradise". 



mercredi 1 janvier 2014

Joyeux Noël et bonne année!

Je vous souhaite à tous un joyeux Noël et une bonne année 2014! 

Happy New Year!

Einen guten Rutsch ins neue Jahr!

Pour ma part, je l'ai passé à méditer au temple Bramavihara Arama, dans le Nord de Bali. J'ai saisi l'occasion d'une retraite de dix jours pour m'initier à la méditation vipassana et le matin du 25 décembre s'est levé sur des sourires et des visages paisibles. Je n'aurai donc pas de photos de Père Noël barbu sous les tropiques à vous montrer, navrée... De toute façon, il ne semble pas trop passer par cette terre hindoue, même si quelques sapins sont dressés dans les hôtels et restaurants touristiques. A Florès, une autre île de l'Indonésie, c'est sûrement différent puisque la population y est majoritairement catholique. 

En plus, j'ai remis ça pour le nouvel an, cette fois face au mont Batur, le volcan de Bali, et au lac de Kintamani... C'était agréable de commencer la nouvelle année ainsi, d'autant plus qu'on a enchaîné le 1er janvier par les sources d'eau chaude situées au bord du lac. 

A défaut de photos de nouvel an sous les tropiques, je vous ai mis en ligne celles du Japon, jusqu'à Kyoto. Je compléterai par Tokyo dans la semaine, puis quelques nouvelles de Bali. Enjoy!